Je rêvais d'être blonde aux yeux bleus. Je rêvais de ne plus avoir la peau bronzée et les cheveux frisés. Je voulais ressembler à mes amies. Je me trouvais moche, inintéressante.
Quand elles me regardaient de haut et se moquaient de mes cheveux, je les regardais faire en pensant que ces moqueries étaient justifiées. Quand je regardais les autres filles de ma classe, j'espérais, un jour, pouvoir éclaircir ma couleur de peau, teindre mes cheveux et changer de couleur d’yeux.
J'ai grandi avec une seule personne avec qui me comparer: mon père. À part lui, je n'avais personne qui me ressemblait. Même ma sœur ne me ressemblait pas. Elle était blonde, aux yeux verts. J'ai longtemps été jalouse qu'elle ait eu la chance de naître comme ça. Qu'elle n'avait pas à rêver pour être belle.
Je n'ai jamais eu de contact avec ma famille noire. Pour être honnête, j'ai longtemps ignoré leur existence. Et donc, aucun de mes cousins, de mes tantes, de mes oncles ne partageait les mêmes traits que moi. Aucun.
Ma propre famille ne me ressemblait pas.
Puis avec le temps j'ai pu faire mes propres recherches sur mes ancêtres et mon père m'a conté ses nombreuses histoires. Elles ressemblaient souvent aux miennes. Il avait aussi vécu des moqueries. J’étais loin d’être la seule.
Et je m'en suis voulu. Je me suis détestée d'avoir osé ne pas aimer ce à quoi je ressemblais, ce pour quoi on s'est battu. Je m'en suis voulu de ne pas m'être défendue contre les moqueries des gens ignorants.
Pour me faire pardonner auprès de ma culture, je me suis mise à lire et à me documenter sur son histoire et aujourd’hui, j’éprouve un immense plaisir à enseigner mon savoir à mes amies et à ma petite sœur.
Je suis très heureuse de pouvoir me sentir différente quand je marche dans les couloirs. Je suis très fière de répondre quand on me demande d’où je tiens mes origines et quand on se moque de mes cheveux, je ne me gêne pas de leur expliquer pourquoi ils n’ont aucun droit de le faire même s' ils ont les cheveux lisses et la peau claire.
Car mes cheveux ne sont pas la version ratée des leurs et ma peau n’est pas la version salie de la leur.
« Nos vies commencent à se finir quand nous restons silencieux à propos de choses qui comptent. »
- Martin Luther King Jr.
Victoria