Depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours pensé que mon père ne pleurait pas. Il est un homme sensible, certes il a beaucoup d’émotions, mais pleurer, ça, je ne l’avais jamais vu faire.
La première fois, c'était à tes funérailles. Tu étais tellement important pour lui. Tu es parti d’une manière si terrible, mais tu souffrais. On m'avait expliqué à l’époque que tu voulais arrêter tes souffrances. Je n’avais pas vraiment compris jusqu’à ce que mon père me l’explique en pleurant dans le salon funéraire.
À ce moment-là, j'ai compris. J’ai compris que la vie n’était pas que bonheur et plaisir. J’ai compris qu’elle pouvait être cruelle et sans pitié. Voir mon père pleurer toutes les larmes de son corps m'avait enlevé cette façade de lui. Cette façade forte. Après ce moment, j’ai compris que tout le monde avait des sentiments et que certains décidaient de les éliminer, même avec eux-mêmes.
Quelques jours après la nouvelle de ta mort, mon père avait des épisodes de grande tristesse. Il se mettait à pleurer à n’importe quel moment. Il pensait à toi. Il devait sûrement se rappeler des matins quand il avait six ans et que tu venais le chercher pour une journée, voire un congé entier avec toi. Seulement lui et toi. Il regrette souvent de ne pas t’avoir vu plus souvent. Qu’il n’ait pas pris le temps de faire en sorte que ma soeur et moi te connaissions plus.
Je sais que c’est cliché de parler dans notre tête à une personne qui est décédée. Comme si la personne qui n’est plus de ce monde nous entendait. Ça ne m’a pas empêchée d’espérer que tu m’entendes chaque fois et, surtout, que tu entendes mon père. J’espère sincèrement que tu vas mieux là où tu es. Je t’aime. Ma sœur t’aime. Ma mère t’aime. Mon père, il t’aime comme un petit garçon qui aime son parrain.
Nelly Dubois