Le temps passe vite en courant.
Il court court court.
Le temps m’étourdit.
Le temps ne me laisse pas le temps de le rattraper.
Le temps me laisse perdu, derrière lui.
Quand le temps passe en courant devant mes yeux, tout devient flou et
mon regard se perd dans le vide.
Mais où est passée la semaine ?
Mais où est passé l’automne ?
Mais où est passé 2021 ?
Mais depuis combien de temps est-ce que mon regard est dans le vide ?
À moins que tout cela ne soit que dans ma tête ?
À moins que ça ne soit que moi qui ne vois pas les jours passer à cause d’un phénomène non expliqué.
Le temps s'essouffle, m' essoufflant au passage,
ne me laissant pas le temps de courir à côté de lui.
Flottant dans le vide, je me laisse bercer par le mouvement qu’il a laissé derrière. Le jour court après la nuit, la nuit court après le jour.
Le temps
court
court
court.
On s’y habitue vite, à ce mouvement. Je regarde les années passer, je me regarde grandir devant le miroir, je regarde mes parents vieillir, je regarde les rires qui s’épuisent, je regarde les fleurs qui meurent, les oiseaux qui chantent de moins en moins, par épuisement. Je regarde la vie passer, dans un courant de rapide trop flou.
Tout à coup, je réalise que cela fait maintenant longtemps que je cours.
J’étais bien occupée à courir.
Courir.
Courir.
S’essouffler.
Essayer de respirer.
Se fatiguer.
S’arrêter et
réaliser.
Sans mots, j’étais bouche bée, mystifiée.
Mon cerveau se rend compte que je suis en secondaire trois, que dans trois mois, je vais avoir fait la moitié de mon secondaire. J’ai l’impression d’avoir fait plein de choses, d’avoir couru beaucoup, aussi. J’ai l’impression d’avoir oublié de vivre entre-temps, j’ai oublié de m’arrêter.
C’est là que j’ai compris que le temps ne nous laissera aucun répit. Le temps est pressé d’avancer, d’aller plus loin, de changer d’année, le temps est pressé tout court. On ne pourra pas le changer, il a la tête dure.
On devra s'adapter, s’habituer à profiter de chaque instant, chaque moment, chaque éclat de rire se perdant dans l’air, chaque larme de joie ou de tristesse s’estompant dans l’univers, chaque rêve se faisant oublier trop vite, chaque réussite nous arrachant un sourire, chaque compliment nous faisant sentir bien.
Pas besoin de courir, on peut poursuivre le temps en dansant, c’est plus beau. On peut juste aussi ne pas courir du tout, on peut juste prendre le temps de s’arrêter souvent et c’est correct.
Il faudrait remplacer les mots “courir, s’essouffler, essayer de respirer, s’arrêter et réaliser” par “courir, respirer lentement, s’amuser, danser, sourire et vivre”.
Camille