J'ai compris très jeune que j'étais différente. Autour de moi, les enfants grandissaient dans une famille épanouie, aisée. Ils avaient des amies, des rêves, des activités extra-scolaires. J’étais de celles qui étaient plus souvent seules, pas parce que je le désirais, mais j’étais incapable d'avoir des amies, j’étais différente. Moi je me souciais du prix de mes vêtements et de ce que j'avais dans mes lunchs, alors qu’elles se souciaient du nombre d’amies qu’elles allaient recevoir à leur anniversaire et quels seraient leurs cadeaux. Je n’ai jamais eu de fête d'anniversaire avec des amies. J'adorais lire et parler avec les adultes, alors qu’elles aimaient parler de potins et de réseaux sociaux. Moi, je n'avais pas eu de réseaux avant ma 6e année, et même encore. Elles avaient des cellulaires et moi j'avais une DS. J’avais appris à apprécier les petites choses alors qu’elles avaient, pour la plupart, ce qu’elles demandaient. Je n’obtenais pas les notes du siècle, mais j'arrivais à sortir la tête de l’eau et, quelques fois, j’étais félicitée. J’avais beaucoup de difficultés et la vie ne m'avait pas donné de coup de pouce, alors je n’ai eu d’autre choix que d’apprendre à m'en sortir seule. Dès mes 11 ans, j’entendais les adultes autour de moi me parler de ma grande maturité, mais, savaient-ils ?
Les gens s’imaginent qu’à 11 ans, on n’a aucune responsabilité. Moi à 11 ans, je m’occupais de mes sœurs. Le secondaire est arrivé, ma théorie sur ma différence était bien réelle. J'étais un élément distinct de la société, j'appartenais à ceux qui avaient appris à survivre avant même de savoir marcher. Comme si cela n’était pas assez, j’ai compris rapidement que j'aimerais Juliette et non Roméo. Mes amies, elles, parlaient toujours des garçons. Je me sentais mal, j'étais une fois de plus différente. Puis, les années ont passé et j’ai trouvé mon style, celui qui ne démontre pas le physique de l'adolescente riche, féminine et parfaite.
Pourtant, la vie a mis sur mon chemin d’incroyables personnes qui m’ont amenée à réaliser que la différence m’avait construite. Certains s’étaient attachés à moi, sans jamais vraiment souligner ou même voir que j’étais différente. En fait, je n’étais pas différente, j'étais unique. Aujourd'hui, je ne m'identifie pas aux adolescentes de mon âge, car je préfère être avec ma famille que mes amies. Je ne bois pas et ne fume pas. Aussi, mes passions se résument à lire, écrire et jouer de la musique. Tout se pratique seule, parce qu’après toutes ces années à avoir vécu seule avec moi-même, j’ai fini par aimer ma propre compagnie. Les histoires qui ne valent pas la peine d'être vécues, je ne les laisse plus m’atteindre.
Après tout, les bonnes personnes arrivent au bon moment, et elles, je sais qu’elles m'aimeront pour qui je suis. Je ne suis pas différente, je suis unique. Finalement, je préfère avoir mes couleurs, pour pouvoir colorer les gens autour de moi. Malgré tout mon parcours, je suis une amoureuse de la vie!
Alycia