J'ai des souvenirs dans ma tête qui semblent être gravés là pour l'éternité. Malheureusement, ce ne sont pas de bons souvenirs. Ce sont des fissures, des failles, des ombres imprimées dans ma mémoire. Ces ombres sont invisibles à tout le monde, sauf moi, elles sont des souvenirs que moi seule peux affronter.
C'est pourquoi, quand j'essaie de décrire ses ombres aux gens, on me dit de les oublier, de passer à autres choses. Ce qu'ils ne savent pas, c'est que je me bats, sans relâche, contre eux à tous les jours. Parfois, elles prennent le dessus et durant ces moments, mon corps passe en alerte, mon cœur prend le rythme d'un tambour, l'air de mes poumons s'échappe et je tente sans cesse de la récupérer. Mon corps tremble tel un arbre dans une tornade, telle une fleur dans un ouragan. Durant ces moments où ces souvenirs prennent le dessus, je ne ressens que la peur, le désespoir et l'anxiété. Tant bien que mal, j'essaie de me raccrocher à quelque chose.
Les gens me disent de me concentrer sur ma respiration, de compter les choses vertes autour de moi, mais je ne vois plus rien, j'ai l'impression d'être redevenue une petite fille qui attend que ses parents arrêtent de se chicaner… Je revis tous ces cauchemars que j'ai essayé d'effacer, de détruire ou d'enfouir, là où mon cerveau ne pourrait jamais les retrouver. Là où mon sommeil ne serait pas corrompu. Pour faire en sorte que je ne fasse pas de crises à chaque fois que j'entends des gens se chicaner, à chaque fois que je crois que quelqu'un est contrarié contre moi. Que je ne me raidis pas comme si je devais me défendre à chaque fois qu’il y a un bruit soudain et fort. Que je puisse continuer à respirer quand j'entends cogner à la porte.
Toutes ces choses ont probablement l'air banales pour vous, mais pour moi, ce sont des choses qui m'affectent énormément. Alors, à chaque fois que quelqu'un me fait une blague et fait un bruit fort pour me faire sursauter, mon cœur lâche, mon cerveau se prépare à un danger, il se prépare à fuir. Exactement comme il a été entraîné durant toute ma jeunesse. Alors non, je ne peux pas oublier, mon cerveau est programmé ainsi. Non, je ne peux pas passer à autre chose en un claquement de doigt, car j'ai des cicatrices invisibles aux autres qui me rappellent mes combats.
J'ai des souvenirs dans ma tête qui semblent gravés dans ma mémoire pour l'éternité. Malheureusement pour eux, à chaque fois qu'ils se présenteront dans mon cerveau, je prendrai mon épée et mon bouclier et les chasserai, jusqu'à ce qu'ils ne puissent revenir. Si toi aussi tu vis la même chose, bats-toi. Et si tu n'en es plus capable, appelle du renfort, tu as le droit de battre en retraite.
Fay
